Crise de l’immobilier « papier » : Plus que jamais, restons sélectifs !
Traditionnellement considérées comme des placements pour « bon pères de famille », les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) nous donnent en ce moment des sueurs froides. Pour rappel, ces SCPI sont composées de trois intervenants : un parc immobilier, une société de gestion qui administre et des investisseurs qui confient leur argent au gestionnaire pour acquérir des biens et récupérer en retour une partie des loyers et des plus-values. Les SCPI investissent dans de l’immobilier d’entreprise, des bureaux, mais aussi des murs de commerces, des entrepôts, des hôtels, des cliniques, voire des logements. La détention de ces biens est mutualisée, et l’épargnant est libéré des soucis de gestion et des relations avec les locataires. L’achat de parts de SCPI est accessible à partir de quelques centaines d’euros, un ticket relativement modeste, permettant à la grande majorité des épargnants d’avoir accès à de l’immobilier locatif, correctement diversifié dans leur nature et dans leur localisation.
Jusqu’à très récemment, les sociétés de gestion vantaient aux souscripteurs l’indéfectible santé du marché de l’immobilier, l’assurance de percevoir des revenus stables et réguliers, le tout avec un rendement alléchant. Bref, un placement vertueux, pérenne et rentable, qui a attiré à juste titre un grand nombre d’investisseurs depuis 20 ans. Ainsi, les SCPI, que l’on avait essayé d’enterrer au lendemain de la crise immobilières des années 1990, ont pris une revanche impressionnante et représentent aujourd’hui une part significative de l’épargne des Français.
Depuis plusieurs mois, les signaux négatifs se multiplient sur le marché de l’immobilier qu’il soit physique ou papier. Le nombre des transactions réalisées en 2023 est en chute de plus de 25% par rapport à septembre 2022.
Quelles en sont les principales raisons ?
Il y a d’abord, bien évidemment, la forte remontée des taux d’intérêt qui pèse sur le marché. En moins de 14 mois, la Banque centrale européenne (BCE) a relevé ses taux directeurs à 10 reprises. Un mouvement de hausse jamais vu en Europe ! Ces augmentations impactent le coût de refinancement des sociétés foncières, qui réalisent par conséquent moins de transactions. Cela impacte également l’économie au sens large, avec une croissance prévisionnelle au plus bas depuis 2013 et donc un affaiblissement des perspectives économiques. De même le développement de la pratique récente du télétravail, restreint les besoins de bureaux des entreprises en périphérie des grandes villes. Les SCPI spécialisées dans le tertiaire ont été les premières à matérialiser les signes du retournement du marché en annonçant aux clients des décotes sur leurs parts de 7 à 15%. Un comble pour un segment longtemps réputé pour sa sécurité et classé risque 2 sur 7 (donc très peu risqué) par les organismes indépendants de notation.
Le secteur des SCPI est aujourd’hui au bord de la crise de confiance. Son principal risque n’est pas tant la fluctuation des valeurs, même si elle est extrêmement désagréable, que celle de l’illiquidité. En effet, les retraits massifs de certains « Zinzins » (les Investisseurs Institutionnels) ont clairement entamé les réserves de cash des gérants de SCPI. Pour être plus concret, lorsque ces très gros porteurs qui drainent des dizaines, voire des centaines de millions d’euros, décident de sortir d’un support d’épargne, ils déstabilisent complètement la gestion de cet actif et peuvent parfois accélérer sa chute. Le gérant rembourse les premiers rachats avec ses réserves disponibles mais est obligé de vendre certains immeubles rapidement pour régler les suivants. Ces ventes forcées ou plutôt non désirées peuvent être réalisées à la casse pour assurer la liquidité du support et éviter que la machine ne se grippe… Cela peut générer une dévalorisation rapide des parts de ceux qui sont restés investis !
À l’avenir, faute d’autorégulation, il faudra certainement mieux encadrer l’entrée comme la sortie des grands investisseurs dans les véhicules d’épargne. En effet, la cohabitation au sein d’un même fonds entre l’institutionnel et le privé est rarement au bénéfice de ce dernier. Les fonds ouverts allemands en ont fait les frais en leurs temps et ont réglé le problème en organisant notamment les conditions de sortie de tout investisseur au-delà d’un certain montant.
Faut-il pour autant abandonner complétement l’immobilier au sens large et la « pierre-papier » en particulier ?
Rien n’est moins sûr ! Les SCPI peuvent encore faire valoir de sérieux arguments. Certes, actuellement les valeurs reculent un peu, mais tant que les cash-flows (loyers) rentrent, le véhicule répond à son premier critère : un produit de rendement distribuant des revenus. Dans le précédent cycle haussier, démarré en 1997, toutes les composantes de l’immobilier (bureaux, commerces, résidentiel, maison de santé…) se valorisaient sans réelle distinction et tous les créneaux étaient profitables. Ce n’est plus tout à fait le cas aujourd’hui et il est primordial de s’intéresser au sous-jacent. Car il n’y a pas un marché immobilier, mais des marchés immobiliers. Et si tous sont frappés pour le moment par le choc des taux, tous ne répondront pas à la crise de la même manière.
Il suffit d’analyser le cas d’un secteur très décrié actuellement pour comprendre toute la complexité du sujet : celui du bureau Parisien, englué dans la mode du télétravail et victime du ralentissement économique. Comme nous l’avons vu précédemment, les SCPI de bureaux ont été les premières à présenter des décotes. Pourtant, la valorisation et le rendement ne sont pas les mêmes en fonction de l’emplacement (comme toujours !) ou de la qualité de l’immeuble. L’attrait renaissant pour la centralité conduit à une hétérogénéité du taux de vacance des bureaux, qui varie, par exemple, de 2% dans le triangle d’or parisien à plus de 15% à La Défense. Il en est de même dans toutes les grandes villes de France. Autre élément différenciant, l’empreinte carbone laissée par le bien immobilier. Un bâtiment bien isolé et peu consommateur d’énergie correspond aux critères de sélection des locataires et génère un taux de vacance plus faible.
Au fond, les SCPI ont été victimes de leurs succès et des centaines de millions d’euros qu’elles ont collectés depuis 20 ans auprès des souscripteurs particuliers et institutionnels. Les sociétés de gestion avaient chaque année des sommes colossales à investir dans de nouveaux actifs avec pour double objectif, un rendement élevé et la progression du capital. Les SCPI « anciennes » n’ont peut-être pas su gérer cette croissance sereinement et ont lentement dégradé leurs performances en se portant acquéreurs d’immeubles qui ne correspondent plus aux envies des nouveaux locataires. Ainsi, Capimmo, la célèbre SCI de Primonial qui « pesait » plus de 7 milliards d’actifs début 2023 en est malheureusement un exemple parfait. Après 20 ans de bons et loyaux services avec des rendements supérieurs à 4% nets et une revalorisation régulière des parts, la SCI a brutalement décoté de 12% le 15 septembre dernier. Nous arrivons probablement au bout d’un cycle d’investissement qui aura duré 25 ans et que la hausse brutale des taux a fini de briser.
Alors analysons le marché avec sérénité. L’immobilier reste une classe d’actif à part entière mais nous devons nous tourner vers des sociétés de gestion qui ont la capacité de prendre en compte les nouveaux paramètres du marché. Il faut désormais privilégier les actifs post-covid, pas encore pénalisés par un stock d’immeubles vieillissants, choisissant une démarche ISR qui respectent les normes environnementales et dont la capitalisation plus faible limite les risques de liquidité. Soyons extrêmement vigilants et sélectifs dans nos investissements et rappelons-nous que l’immobilier reste un investissement de long terme.
Stéphane Lenoir
Le support du trimestre : Eleva Euroland Selection
ELEVA Capital est une société de gestion d’actifs, indépendante, fondée en 2014 par Eric Bendahan. L’ADN de la société est initialement ancré autour d’une expertise sur les actions européenneset les petites et les moyennes capitalisations. La gamme de fonds s’est néanmoins étoffée pour proposer de l’investissement à impact et des obligations.
En outre, ELEVA Capital a conclu un partenariat innovant et à long terme avec l’UNICEF, en lui allouant près de 10% des bénéfices de l’entreprise via la Fondation ELEVA.
Parmi la gamme de supports proposée par la société, Eleva Euroland Selection est un fonds actions européennes sans contrainte de style de gestion ou de taille de capitalisation. La gestion recherche des sociétés familiales ou des fondations, des sociétés innovantes dans des secteurs d’activités matures et des sociétés venant de subir un changement de management ou d’actionnariat. Elle privilégie des valeurs pour lesquelles il y a une divergence de valorisation entre le marché du crédit et le marché actions. La gestion sélectionne les actions dossier par dossier mais affine son analyse par une vue macro-économique. Cette analyse va notamment faire évoluer le portefeuille entre thématiques cycliques et défensives. La gestion inclut également des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) pour sélectionner ses valeurs. À ce titre, le fonds est labellisé ISR (Investissement Socialement Responsable).
Actuellement, l’équipe de gestion fait preuve de prudence et garde un positionnement majoritairement défensif dans un contexte macroéconomique déroutant. Elle observe également un creux sur les valeurs cycliques qui pourraient être soutenues par des effets de déstockage, ce qui l’incite à réinvestir de façon opportuniste dans quelques entreprises des secteurs de l’énergie (TotalEnergies), les matériaux de base (RioTinto, Linde), la chimie (BASF). A l’inverse, la gestion a baissé son exposition aux valeurs du luxe (vente de Richemont et réduction de LVMH) avec le contexte de ralentissement que l’on commence à percevoir en Europe.
Les performances sont au rendez-vous : + 8.92% par an depuis 3 ans et + 10.70 % en 2023 (performances au 20/09/2023, source Morningstar, fonds créé le 28/01/2019). Eleva Euroland Selection est éligible dans la plupart des contrats d’assurance vie que nous proposons.
Julie Roussenque
EN BREF
9.944 euros
C’est le prix moyen du m² observé ces dernières semaines à Paris selon les derniers indices «Meilleurs Agents – Les Echos». La capitale, marché phare et le plus cher de France, repasse donc sous la barre symbolique des 10.000 euros le m²
– 38%
C’est le pourcentage de baisse des ventes de maisons enregistrées entre juillet 2022 et juillet 2023 selon la Fédération française du bâtiment.
1.4 %
C’est la nouvelle prévision de croissance de l’économie française en 2024, communiquée en septembre par le gouvernement. Il tablait jusque-là sur une prévision de 1.6 %…
LES PRINCIPAUX INDICES DU 01 JANVIER AU 29 SEPTEMBRE 2023
LES INDICES BOURSIERS
CAC + 10,86 %
SBF 120 + 9,76 %
DOW JONES + 1,09 %
NASDAQ COMPOSITE + 26,30 %
EURO STOXX 50 + 10,75 %
LES PLUS FORTES VARIATIONS DU CAC 40 EN 2023
STELLANTIS + 37,17 %
TELEPERFORMANCE – 47,98 %
LES TAUX D’INTÉRETS
EURIBOR 3 MOIS + 3,952 %
OAT 10 ANS + 3,41 %